Le monstre de la forêt, plus communément appelé "la fille aux serpents" par les quelques villageois qui étaient conscients de son existence, s'était réfugiée dans les terres glacées depuis quelques années déjà. Comment elle s'était habituée au climat ? Aucune idée ; peut-être était-ce grâce à son origine de serpent des neiges. Alors que n'importe quel humain aurait senti la morsure glaciale du vent sur sa peau, elle ne ressentait rien à se demander si elle n'était pas déjà morte en réalité. Enfin, là n'était pas le plus important, de toute façon elle ne manquerait probablement à personne. Pourquoi ? Parce que dans tous les cas elle vivait isolée du monde, n'ayant avec elle que quelques livres pour se cultiver. Il n'y avait pas à dire elle se sentait seule, mais elle considérait que cela valait mieux pour tout le monde, pas seulement pour elle.

Cependant elle se trouva vite dépourvue de livres, les ayant lus et relus et elle eut l'envie d'en obtenir plus. Mais elle en voulait des précis : le même genre que ceux qu'Arihito lui amenait autrefois. Résultat, cachant son visage sous une longue cape noire elle s'aventura vers les terres de son passé. Lorsqu'au bout d'un certain temps elle remit les pieds dans ce climat printanier elle fut fort mal à l'aise, agrippant fortement sa capuche afin d'être certaine de ne pas être vue. Plus elle croisait de gens plus elle se sentait mal à l'aise : elle voulait fuir, mais si proche du but elle ne pouvait pas abandonner. La jeune fille se disait tout au fond d'elle pour se rassurer qu'elle allait bientôt pouvoir à nouveau tourner les pages d'un nouvel ouvrage et en apprécier le contenu. Pour ce simple objectif elle prit son courage à deux mains... mais ça c'était avant de bousculer quelqu'un et que sa capuche tombe en arrière.

Là ce fut la panique. Son visage à découvert elle bouscula tous les villageois qui la regardaient, se frayant un chemin pour pouvoir s'enfuir. Le cœur palpitant de frayeur elle pressa le pas, essayant d'ignorer les mots qui parvenaient à ses oreilles : elle n'entendait pas bien ce qu'ils disaient mais elle ne voulait pas, ayant bien trop peur pour cela. Une fois isolée du tas elle reprit son souffle, essayant de se calmer afin de ne pas laisser ses cheveux se transformer en serpents. Dans l'état paranoïaque où elle se trouvait il serait certainement difficile de la raisonner. Alors qu'elle croyait pouvoir être tranquille elle sentit une présence, puis une deuxième et une troisième. Soudainement elle se braqua, regardant les alentours de ses yeux brillants d'un rouge vif : même si elle ne le laissait pas transparaître elle était terrorisée, et c'est d'ailleurs pour cela que les pointes de sa chevelure finirent par prendre l'apparence de serpents.

« N'approchez pas ! » furent les seules paroles qui sortirent de sa gorge, prononcées d'un ton glacial.